Brice Tarvel : Les Prisonnières du silence, Nuz Sombrelieu n° 1, Le Carnoplaste, 2010
Hier, lorsque j’entendis l’appel tintinnabulant des ustensiles que l’on choque à mon intention, sans tenir compte de mon indignation d’être conviée si peu mélodieusement à table, j’achevais à pic l’ultime ligne d’un récit ensanglanté. J’embrouillai d’un geste machinal le souvenir de ma coiffure du matin et scrutai la porte d’un œil prudent, le sort des dames n’est pas enviable en dehors des murs du cabinet des Obligeances. Qu’aurait fait Nuz Sombrelieu ? Et je me remémorai que certaines nuisances sonores pouvaient s’avérer à l’usage providentielles, sans oublier qu’on ne saute pas un repas dans les histoires de Brice Tarvel, ignominieux cadavres ou pas, et certainement pas pour quelques bestioles mal intentionnées !
Je me suis bidonnée tout au long de cette histoire, à m’en faire couler cinq larmes de joie émue. Les mises en bouche de ce buffet plus froid qu’une morgue et les noms des personnages, alambiqués au fond d’un laboratoire souterrain, sont un régal pour le palais des fumeurs. Il y a de l’ambiance rauque et graillonneuse dans le Paris de l’Homme au ventre-de-cuir, quand, sans prévenir la lectrice, ahurie de tant de postillons aussi élégants, la font sursauter de quelques exactions bien sordides et mortelles. Les prisonnières du silence — les pauvres, sans même le réseau internet pour se distraire —, c’est au Carnoplaste, les éditions horrifiantes de Robert Darvel.
Et ne manquez pas la suite : La nuit sinueuse, n° 2 de la saga de Nuz Sombrelieu !