On n’est jamais si bien servi que par soi-même
Georges Lang s’en souvient lorsqu’il publie dans sa revue « L’Art Vivant » n° 175, en mai 1933, un article rédigé par un anonyme à la gloire de son entreprise, l’imprimerie Hélios-Archereau à Paris. Grand patron, il présente sa maison, la sienne en propriétaire, ignorant la main-d’œuvre qui l’a construite et le fait vivre. En 1936, il subira une certaine déconvenue quand les ouvriers paralyseront la production pendant plusieurs semaines. Cependant, le témoignage direct, peu courant, de ce qu’était une imprimerie moderne et la diffusion en masse d’objets en papier ne manque pas d’intérêt.
Nous avons interrogé M. Georges Lang […]. Ses paroles expliquent avec netteté l’impression que l’on retire d’une visite de l’édifice : « Je n’ai pas construit une maison de parade et de publicité, mais j’ai voulu que l’architecture nouvelle, au même titre qu’une machine de création récente, apporte à la fabrication des avantages effectifs. Ce n’est pas un appareil d’apparat, mais un élément destiné à améliorer les prix de revient et la qualité de ma production. »
C’est en mars 1919 que M. Georges Lang, après sa démobilisation, créa son imprimerie par la fusion de la Typographie moderne et de l’Imprimerie lithographique fondée en 1902 par son père, M. Arthur Lang et par M. Armand Breger. Installée d’abord rue Baudin, puis rue Championnet, l’imprimerie Georges Lang fut transférée en 1923, 11 bis, rue Curial. C’est là que s’élève le noble édifice dont nous venons de parler et qui fut achevé en septembre 1932.
M. Georges Lang estime à juste titre que c’est une économie ruineuse d’utiliser des vieilles machines. Aussi a-t-il su se constituer l’outillage le plus moderne qui existe en France, et le plus complet. Son principe, obtenir par une production massive l’abaissement des prix de revient et des prix de vente, conserver à cette production, par une surveillance incessante, une qualité parfaite. Son matériel typographique permet de sortir, chaque jour, 30 tonnes de papier et de livrer aisément 500 000 couvertures. Son installation d’offset, la plus puissante de Paris, réunit 12 rotatives à feuille imprimant deux couleurs à la fois. Enfin, les ateliers de brochure correspondent à l’importance des ateliers d’impression et peuvent brocher 500 000 catalogues quotidiennement ; mais la quantité est peu de choses si elle est obtenue aux dépens de la qualité. M. Georges Lang a toujours veillé avec soin à ce que les travaux sortis de ses presses soient méticuleusement surveillés et soient des travaux de classe, la réalisation de » l’Art Vivant » prouve qu’il y a réussi. Ce sont ces moyens d’exécution qui ont provoqué la prodigieuse ascension de cette maison dont les ateliers occupent plus de 20 000 mètres carrés, qui emploie 1 221 personnes, et dont le chiffre d’affaires, en 1931, fut soixante fois supérieur au chiffre réalisé en 1919.
Faisons rapidement le tour de l’imprimerie. Au premier étage : les services techniques, de fabrication. Au deuxième étage, le centre administratif, le bureau de M. Georges Lang, ceux des chefs de service. C’est au troisième étage que sont réunis les bureaux des différentes publications éditées par M. Georges Lang, « L’Art Vivant », « Benjamin », « Science et Monde ». Le quatrième étage est réservé aux dessinateurs qui étudient les maquettes d’affiches, catalogues, etc. Au cinquième étage et sixième étage, les studios de photographie, les salles de préparation des feuilles de zinc d’offset. Nous descendons les six étages pour trouver au rez-de-chaussée, dans plusieurs halls compartimentés, les monotypes, les linotypes, les machines à imprimer en typographie et en offset.
Notons que cette firme comprend une autre usine installée à une centaine de mètres de la maison mère, propriété commune de plusieurs imprimeurs français et qui est consacrée à la fabrication de l’héliogravure. Elle élève sur trois étages une silhouette également nette et élégante, conçue sur le principe de l’architecture de rapport. Ses ateliers les plus importants qui soient, à l’heure actuelle, en France, réunissent rotatives à papier continu et peuvent tirer les plus grands formats.
Telle est cette grande entreprise qui exécute les travaux les plus variés, les plus importants comme les plus modestes, qui imprime dans des ateliers spécialisés tous les travaux réclamés par l’impression publicitaire les catalogues, les tracts, les tableaux-réclame ; tous les périodiques, depuis les éditions de luxe à tirage limité jusqu’aux périodiques de grande diffusion, tous les livres illustrés ou non ; tous les enveloppages, étiquettes, boîtes pliantes, boîtes à cigarettes, étuis à chocolat ; les papiers fiduciaires, actions, obligations, etc.
Une grande entreprise française.
Il existe une photographie légendée « Imprimerie Hélios-Archereau Façade sur la rue Archer. Photo Schal », mais je n’ai pu la récupérer. En lieu et place, cet article est illustré par des clichés datant d’environ 1935, issus de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris : « Impression du journal « Toute l’édition » à l’imprimerie Georges Lang, rue Curial, n° 11 à 15. Ouvriers au travail sur diverses machines et cycliste livrant les liasses de journaux. » par l’artiste Jean Roubier (1896-1981).